top of page

Gabon (2021)

Le droit foncier coutumier

La gestion foncière au Gabon se caractérise par la prédominance d’un droit coutumier de propriété et d’usage des terres datant de la période précoloniale. Ce droit coexiste en parallèle au concept d’immatriculation foncière par le titre foncier, hérité de l’administration coloniale et qui est mis en œuvre par l’intermédiaire de plusieurs dispositions réglementaires, le Gabon ne possédant pas de « code foncier » en tant que tel. 

Les droits fonciers coutumiers gabonais sont propres à chaque groupe ethnique, mais présentent des similitudes. Comme dans nombre de pays africains, il repose sur le système de « primo-occupant », dans lequel les droits de gestion des ressources foncières reviennent au clan qui a été le premier à s’installer et à cultiver un espace. L’administration des terres coutumières est alors assurée par un chef de terre, descendant du premier occupant des lieux. La ressource foncière est une propriété collective (la terre coutumière appartient à l’ensemble de la communauté et les individus ne peuvent disposer du droit de propriété individuel) et inaliénable (la communauté villageoise considère la terre comme un don des ancêtres et des forces surnaturelles et non comme un bien transmissible). 

Selon la réglementation nationale, les droits fonciers coutumiers ne constituent pas une propriété privée et ne concernent que l’usufruit de la terre (Voir § 5.4). Le droit foncier coutumier n’est donc pas reconnu légalement ni perçu comme ouvrant droit à la propriété privée (ni à d’autres formes de propriété).

 

Le régime foncier formel

Les principales réglementations constituant ce droit sont les suivantes:

l  La Loi nº 14-63 du 8 mai 1963 fixant la composition du domaine de l'Etat et les règles qui en déterminent les modes de gestion et d'aliénation ;

l  La Loi n°3/2012 portant ratification de l’ordonnance n°5/2012 du 13 février 2012 fixant le régime de la propriété foncière en République gabonaise. Cette loi abroge la loi n°15/63 du 08 mai 1963 fixant le régime de la propriété foncière ;

l  Le Décret n°249/PR/MECIT du 19 juin 2012 fixant l’organisation des conservations de la propriété foncière et des hypothèques ;

l  La Loi nº 6-61 du 10 mai 1961 réglementant l’expropriation pour cause d’utilité publique et ses ordonnances (ordonnance nº 52/PR du 12 octobre 1970 relative à l’expropriation des terrains insuffisamment mis en valeur et ordonnance n° 2/76 du 6 janvier 1976 complétant l’article 10 de la loi n° 6/61 du 10 mai 1961, réglementant l’expropriation pour cause d’utilité publique et instituant des servitudes pour l’exécution des travaux publics)

 

Le Domaine National de l’Etat gabonais 

Le Domaine National de l’Etat gabonais est composé, selon la loi portant Domaine National, de deux catégories fondamentales : 

l  du domaine public, qui peut être naturel ou artificiel et qui comprend tous les biens qui, par leur nature ou leur destination, sont à l’usage de tous et qui, n’étant pas susceptibles de propriété privée, sont inaliénables et imprescriptibles

l  du domaine privé, qui comprend « les terres qui ne sont pas appropriées selon le régime de l’immatriculation ou qui n’ont pas été concédées à titre définitif » (Art.2 de la Loi nº 14-63). Autrement dit, l’ensemble des terres non immatriculées appartiennent au domaine privé de l’Etat, ce qui constitue la majorité des terres du Gabon.

 

Procédure d’immatriculation et le régime de la propriété foncière

L’immatriculation foncière au Gabon a fait l’objet d’une réforme afin de remédier à la complexité et la longueur des procédures par la création de l’Agence Nationale de l’Urbanisme, des Travaux Topographiques et du Cadastre (ANUTTC). Elle suit plusieurs étapes dont les principales sont :

l  Dépôt du dossier de demande d’immatriculation par le requérant auprès de l’ANUTTC ou de la Conservation foncière ;

l  Création de la réquisition d’Immatriculation après paiement des taxes par le requérant ;

l  Publication de la réquisition d’immatriculation au journal officiel ou tout autre journal d’annonces légales et attente des éventuelles oppositions pendant un délai de 15 jours ;

l  À la fin du délai de 15 jours, le dossier de demande d’immatriculation est transmis au Greffe du Tribunal judiciaire du lieu de situation de l’Immeuble, s’il n’existe pas d’opposition, le président du tribunal prend une ordonnance autorisant la création du Titre Foncier ;

l  Le conservateur crée le Titre Foncier en transcrivant au livre Foncier soit l’ordonnance du président du tribunal, s’il n’y a pas eu d’opposition, soit le jugement du tribunal, s’il y a eu une ou des oppositions enregistrées ;

l  Retrait du Titre foncier après paiement (45.000 FCFA).

 

Expropriation pour cause d’utilité publique

Une expropriation doit être précédée d’une déclaration d’utilité publique (DUP) qui intervient à la suite d’une enquête qui aura conduit à la détermination des parcelles à exproprier, ainsi qu’à la recherche des propriétaires, des titulaires de droits réels et des autres intéressés. (art. 1). Cette DUP peut faire acte de notification de l’expropriation aux propriétaires. Une fois la notification réalisée, le Maître d’Ouvrage doit communiquer à l’exproprié le montant des indemnités qu’il souhaite lui reverser, et de la même façon, l’exproprié est invité à faire connaître au Maître d’Ouvrage le montant des indemnités dont il souhaite bénéficier (art.10).

La fixation des indemnités, prévue au chapitre III de la loi, est conclue par un accord amiable entre les deux parties, et si ce n’est pas le cas, la décision revient au Tribunal de Grande Instance (art. 11). Une visite des lieux est effectuée en présence du juge désigné, d’un expert et du Directeur des Domaines. Après avoir recueilli les avis et effectué une audience publique, le juge émet un jugement motivé qui distingue notamment, dans la somme allouée à l’exproprié, l’indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires (art. 16). 

Les indemnités allouées doivent couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l’expropriation (art. 10). Le juge fixe toutefois le montant des indemnités d’après la valeur des biens au jour de sa décision (art. 20).

Le propriétaire dispose d’un mois pour abandonner les lieux à compter soit du paiement ou de la consignation de l’indemnité, soit de l’acceptation ou de la validation de l’offre d’un local de remplacement (art. 24). 

Procédure d’acquisition foncière comprend les étapes suivantes :

l  Le Maître d’ouvrage définit exactement les zones d’emprises nécessaires au projet ; 

l  Puis il transmet une requête au Ministère de l’Energie qui exerce la tutelle sur le projet ;

l  Le Ministère de l’Energie transmet à l’Agence Nationale de l’Urbanisme, des Travaux Topographiques et du Cadastre (ANUTTC) une demande de réservation foncière en spécifiant les zones ;

l  L’ANUTTC diligente une enquête préalable, où seront définis les titres fonciers concernés et où seront réalisés le recensement et l’évaluation des biens concernés. Le Ministère de l’Agriculture pourra intervenir pour les biens agricoles. Des compensations seront définies pour les mises en valeur suivant les barèmes légaux établis ; s’il y a des titres fonciers il faudra exproprier. Les droits d’usage coutumiers sont reconnus et dédommagés (pas indemnisés). 

l  Des campagnes de sensibilisation accompagnent le processus DUP.

 

le Droit d’usage coutumier (article 252 du code forestier, la loi 16/01)

Le code forestier gabonais ne définit pas les droits d'usages coutumiers. Cependant il décrit leur objet. L'article 252 du code indique que - «L'exercice des droits d'usages coutumiers a pour objet la satisfaction des besoins personnels ou collectifs des communautés villageoises...». Cet objet est celui relatif au domaine forestier. Au lieu de le définir de façon générique, le législateur a pris le soin d'en énumérer de façon limitative les différents éléments qui le composent. Il s'agit de:(art.252):

l  l'utilisation des arbres comme bois de construction et celle du bois mort ou des branches comme bois de feu ;

l  la récolte des produits forestiers secondaires, tels que les écorces, le latex, les champignons, les plantes médicinales ou comestibles, les pierres, les lianes ;

l  l'exercice de la chasse et de la pêche artisanales ;

l  le pâturage en savane, en clairières et l'utilisation de branches et feuilles pour le fourrage ;

l  la pratique de l'agriculture de subsistance ;

l  les droits de pacage et d'utilisation des eaux.

Toutefois, en son article 13 le code forestier dispose que «Toute forêt relève du domaine forestier national et constitue la propriété exclusive de l'Etat». Il s'ensuit que le droit de propriété sur la forêt est exclu pour toute autre personne physique ou morale.

 

PS5 de la SFI : Acquisition de terres et réinstallation involontaire

La réinstallation involontaire est reconnue lorsque les personnes ou les Communautés affectées n’ont pas le droit de refuser que l’acquisition de leurs terres ou que leurs restrictions d’utilisation entraînent un déplacement physique ou économique. 

Les objectifs relatifs sont d’éviter ou de limiter la réinstallation involontaire ainsi que l’expulsion forcée, mais également d’anticiper, d’éviter ou de limiter les impacts sociaux et économiques négatifs résultant de l’acquisition ou de la restriction d’utilisation de terres. Concernant ce dernier point, une indemnisation ainsi qu’une communication appropriée, une consultation et une participation des personnes affectées sont nécessaires. 

Par ailleurs, sont préconisées également des améliorations concernant le rétablissement des moyens d’existence et des conditions de vie des personnes déplacées. 

Dès la conception du projet, le client se doit d’explorer l’ensemble des alternatives possibles afin de limiter ou d’éviter les déplacements physiques ou économiques. Lorsque les déplacements ne peuvent être évités, une indemnisation et des avantages pour les personnes déplacées doivent être mis en place. De plus, le client doit interagir avec les Communautés affectées par le biais du processus d’engagement des parties prenantes (cf. norme n° 1) et mettra en place le mécanisme de règlement des griefs. 

bottom of page